top of page

IraK :

La bataille de la reconstruction

mis en ligne le 11/04/2020

L'élection législative de mai 2018 donne le Chiite Moqtada al-Sadr gagnant. Cela pourrait être une victoire des Chiites pro-iranien mais  il rassemble également les Sunnites car il est l’incarnation du nouveau nationalisme Irakien. Il refuse ainsi les ingérences du passé et estompe les conflits ethniques et religieux.

20160501Moqtada-al-Sadr-640x330.jpg

Moqtada al-Sadr

L’Irak est le pays central du Moyen-Orient cependant il n’a qu’un accès à la mer : le Golfe Persique. Les bords du Tigre et de l’Euphrate concentrent l’essentiel de la population Irakienne or ces deux fleuves prennent leurs sources en Turquie. Ils se rejoignent au Sud-Est de l’Irak avant de déboucher dans le Golfe Persique. La région la plus fertile est située entre les deux fleuves, région que l’on nommait dans l’antiquité « Mésopotamie » qui signifie littéralement en grec « le pays entre les fleuves ».

Densité_de_population_-_fleuves.png

Carte de la densité de population

Depuis la décolonisation jusqu’à la chute de Saddam Hussein en 2003, les Sunnites ont occupé le pouvoir et les Chiites ont toujours été relégués dans l’opposition. Hussein a d’ailleurs toujours remis en cause les limites du pays établies par l’anglais Mark Sykes et le français François-Georges Picot à la chute de l’empire Ottoman. C’est pourquoi en 1980 il déclare la guerre à la République Islamique d’Iran en espérant récupérer le Khouzistan très pétrolifère. En 1990 il envahit le Koweït pour les mêmes raisons.

En conséquence les Etats Unis déclare la guerre à l’Irak. A la suite de ces 10 ans de guerre les Sunnites perdent de l’influence au profit des Chiites. Les Sunnites seront marginalisés, certains (anciens prisonniers des forces US) créent une milice armée indépendantiste et se proclame « Etat Islamique » plus connu sous le nom de « Daech ». Cette organisation prend racine en Syrie (cf. Dossier Syrie) puis s’étend rapidement vers l’Irak où Daech prend Mossul, 2ème ville du pays.

zehn_jahre_irak_krieg_hussein_1980_body_

Saddam Hussein

Abu-Bakr-al-Baghdadi-581199.jpg

Abu Bakr al-Bagdadi (qui veut dire "Abu bakar l'originaire de Bagdad"  capital de l'Irak)  calife de l'état islamique 

Depuis la chute de Daech, le pays tente d’effacer les divergences Chiite-Sunnite mais le pays se retrouve pris dans la guerre d’influence de l’Iran (cf. Dossier Iran) ainsi que dans les inquiétudes turques vis-à-vis des Kurdes occupant le Nord de l’Irak.

Ethnies.png

Carte de la répartition des différentes ethnies en Irak (les zones vierges étant relativement inhabitées  car désertiques)

En effet l’Iran essaie d’influencer les Chiites pour tenir hors du pouvoir les Sunnites. De plus Nadjaf et Kerbala (Villes) sont deux des principaux lieux Saint du Chiisme. Nadjaf étant le tombeau d’Ali, père fondateur du Chiisme et à Kerbala celui de son fils, Hussein. Cela inquiète donc l’Arabie Saoudite qui réplique en soutenant les Sunnites.

Nadjaf.jpg

Nadjaf

picture.jpg

Salle de prière devant le tombeau de l'Imam Ali à Nadjaf

Kerbela_Hussein_Moschee.jpg

Kerbala

Kerbala.jpg

Tombeau du fils d'Ali, l'imam Hussein à Kerbala

Toutefois, si l’Iran a toujours été proche de l’Irak, notamment sur le plan commercial, les USA ne voit pas d’un bon œil cette proximité. C’est pourquoi les Etats Unis sont toujours présents militairement en Irak depuis la fin de la guerre contre Hussein. L’émergence de l’Etat Islamique justifie leur présence et leurs bases militaires sur place.

640x410_base-al-assad-irak-illustration.

Base al-Assad en Irak de l'armé Américaine

A la suite des toutes premières élections législatives depuis la chute de Daech, c’est le camp du nationalisme communiste Moqtada al-Sadr qui remporte la majorité des sièges au parlement, rejetant complétement l’ingérence des deux nations, grâce à une alliance entre le parti Sadr et le parti communiste irakien. Cette alliance porte le nom « En Marche » (Saïroun en arabe) et a nommé Barham Salih, un kurde, comme président de la république. Il a choisi comme premier ministre Adel Abdel-Mahdi qui est un chiite indépendant, issu d’aucune coalition dominant l’Assemblée.

Election 2018.png

Carte des élections législatives de mai 2018 (alliance "En marche" = ARR)

Barham_Salih_(cropped).jpg

Barham Salih - Président de la république d'Irak

le-nouveau-premier-ministre-irakien-adel

adel Abdel Mahdi - Premier Ministre d'Irak

Cinquième réserve pétrolière au monde, l’Irak prévoit d’exporter 7 millions de baril par jour d’ici à 2022 soit 2 millions de plus qu’aujourd’hui. C’est pourquoi la volonté d’Indépendance du Kurdistan Irakien (qui possède une bonne partie des réserves d’hydrocarbure) est devenue gênante pour la réunification de l’Irak. En effet, un référendum dans les zones Kurdes a donné 92 % de vote en faveur de l’indépendance avec une participation de 72 % des électeurs. Depuis, l’armée Irakienne tente de reconquérir les zones Kurdes en coupant le lien du passage dit « de la porte de Semalka » qui relie le Kurdistan Irakien au Rojava Syrien.

ressources.png
Gisement_edited.jpg

Carte des ressources du Moyen-Orient 

Hy.png

Exploitation d'hydrocarbures

Eau.png

Réserve en eau

La reconstruction du pays est néanmoins difficile car le premier ministre Adel Abdel-Mahdi a nommé quelques ministres. Mais il reste encore les postes clés à pourvoir et Téhéran use de son influence sur les chiites pour que soit désigné Falah al-Fayad, l’un des dirigeants des milices chiites pro-iranienne Hachd al-Chaabi. Celles-ci sont principalement composées de brigades Bard et Kataeb Hezbollah qui sont dirigées directement à Téhéran par le major général Qassam Soleimani (cf. dossier Iran). Les États-Unis ont déclaré le 31 Décembre 2019 qu’il était l’organisateur de l’attaque contre l’ambassade des États-Unis à Bagdad le même jour. Cette attaque répondait aux frappes aériennes américaines du 29 décembre 2019 qui visaient des dépôts d’armes et les installations de commandement du Ketaeb Hezbollah en Irak et Syrie. Pour répliquer de nouveau et mettre un terme à l’escalade, les américains éxécutent Qasem Soleimani dans une attaque de drones ainsi que le commandant de la milice irakienne du Kataeb Hezbollah le 3 janvier 2020.

8d02bc0b-3e1b-4c91-b7a2-b53af952904e.jpg

Falah al-Fayad

thumbs_b_c_53a4f9237c6f93b05d0e02c49191b

Qassem Soleimani

Les restes de Daech sont toujours là avec encore des zones sous influence de l’EI. Des combats sont également en cours dans le pays notamment le long du Tigre et autour de Bagdad. Il reste beaucoup de zones qui n’ont pas été déminées en particulier au Kurdistan Irakien. Nombre de charniers sont également découverts chaque semaine, certains sont même piégés.

Daech + combat + mines.png

Carte des dangers généres par la fin de Daech

EI + Combats + mines + charniers.png

Charniers découverts

Carte des charniers de Daech

zones + bases.png

Carte des conflits en Irak sur fond ethnique 

D’un point de vue économique, le chômage touche plus de 50 % des jeunes. L’électricité, principalement issue de barrages hydroélectriques, et l’eau manquent. Là encore, une puissance étrangère est à l’œuvre. La Turquie, qui possède les sources du Tigre et de l’Euphrate, contrôle le débit de ces derniers afin d’obliger l’Irak à répondre à ses exigences qui sont d’éradiquer les Kurdes et leur Kurdistan. Les Américains et Européens en profitent également pour devenir les principaux acteurs de la reconstruction irakienne. En octobre 2018, un programme majeur est signé avec General Electric (GE) de 15 Milliards de dollars pour la production et la distribution d’électricité. Un contrat du même type est signé avec Siemens (groupe allemand) pour environ 700 millions de dollars. Pour l’eau, Siemens, GE et Eni (groupe pétrolier Italien) se sont engagés sur un programme de purification de l’eau tout en négociant avec la Turquie qui se dit prête à un partage plus équitable des eaux. L’Iran veut contrôler le marché pétrolier Irakien pour écouler ses propres barils de pétrole car l’embargo Américain empêche l’export de pétrole de l’Iran. L’Iran se sert du marché Irakien pour vendre ses barils. Or Washington met la pression sur l’Irak pour qu’il cesse son partenariat avec l’Iran alors que l’Irak importe du gaz Iranien nécessaire à son économie et revend à l’Iran de l’électricité.   

En conclusion, l’Irak a encore du chemin à faire pour se reconstruire. Mais si le pays arrive à continuer sur la voie de la réconciliation ethnique (exprimée dans les urnes), à multiplier les partenariats avec différents pays afin de ne pas être dépendant d’un seul et à la démilitarisation étrangère de son territoire, elle y arrivera sûrement car elle en a les ressources.   

bottom of page